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Qu’est-ce que ?

La guerilla jardinière en milieu urbain

Témoignage depuis la bonne ville d’Angers

samedi 28 août 2004

Un appel "sème ta zone 2004", appelait à la multiplication des guerillas jardinières au printemps...
Au final, il y en a eu une lors du Festival de résistance au capitalisme de grenoble puis à angers. C’est cette dernière qui est décrite ci-dessous.

De l’appel un rien enflammé sont nées diverses polémiques sur la pertinence stratégique de la guerilla jardinière, certains la mettant au rang d’agitation symbolique et spectaculaire ne risquant pas de faire chanceler l’industrie agro-alimentaire, tandis que d’autres y voient une pratique réellement
offensive de laquelle peut naître des projets de potagers occupés à long terme, l’entretien de pratiques potagères chez les urbains, aussi bien
qu’une réflexion concrète sur les possibilités d’autonomisation alimentaire et les politiques d’urbanisme... Toujours est-il que l’appel insiste sur le fait que la guerilla potagère puisse ne pas durer un seul jour, mais être un départ pour des espaces collectifs. Il semble que ce soit bien le but de cette journée à angers.

On arrive sur une place assez vide avec un kiosque à
musique et une trentaine de personnes autours. Des pots et plaquettes pleins
de petites plantes jonchent le sol, des brouettes sont remplies de pioches,
pelles, peintures et panneaux. Un lettrage en couleur sur fond argenté
annonce : la " betterave rouge et le radis noir vaincront le capital". Le
rassemblement commence par une bouffe, mais je préfère ne pas manger encore
pour ne pas m’endormir. Un petit briefing d’action en cercle sur le kiosque
se fait, mais sans que masse d’informations pratiques sur l’organisation de
l’action et ses objectifs ni d’infos légales de base ne soient vraiment
creusées. Mais l’ambiance est bonne et une bonne partie des personnes
présentes semblent s’être préparées activement ou avoir participé à
l’organisation.

Divers petit groupes sont arrivés pendant le repas et l’on
part à une centaine dans les rues en musique. On est rapidement suivis par quelques policiers en voitures (angers est apparemment une ville expérimentale avec tout un tas d’écoles et de corps de police
entousiasmants). On arrive dans un premiers parc autour duquel des gamins font du skate ou jouent au foot et là c’est la ruée magique de la guerilla
jardinière : quelques dizaines de personnes s’appliquent à retourner la terre
et à planter dans tous les sens en privilégiant les endroits ou cela risque
de rester. Des petites pancartes sont enfouies dans le sol avec les noms des
variétés plantées. On s’entrapprend ce qui a des chances de pousser, à
quels distances les unes des autres et comment repiquer, le fait que les
gens d’ici appellent les "bettes" des "cardes" et à reconnaitre les pousses.

...

Puis on repart assez vite en faisant un peu
gaffe et on s’arrête sur une berge de la loire en friche, un panneau jardin collectif est implanté ainsi que pleins de petites plantes. Une partie des
gens sont allongés le long de la rive, d’autres guettent, d’autres
s’affairent avec pioches et arrosoirs. Sur ce terrain loin des jardins
municipaux surentretenus, il y a de chances que cela reste et soit utile.

On traverse le fleuve pour arriver à une fête de quartier, il y a une ligne de jardinières vide que l’on remplit de terre de terreaux et de divers
légumes et plantes arômatiques, plein de gens se regroupent, réagissent, applaudissent. Je pense que certain-e-s sont perplexes et se demandent si on
est pas des artistes , une animation de la ville ou une bande d’allumé-e-s échappés de la gay pride qui avait lieu en même temps. Il y a peu de prises
de paroles collectives explicites, mais là où des conversations interpersonelles s’engagent, le message passe et on a quand même un petit tract qui expose la démarche et s’attaque à l’industrie agro-alimentaire.

Finalement, on aboutit tant bien que mal au but secret, un terrain en friche asssez
luxuriant casé au milieu de quelques barres d’immeuble. L’espace est
abandonné depuis 10 ans et doit servir dans les années à venir pour la
consruction d’une maison de l’environnement. L’idée est de le garder et d’en
faire un grand potager collectif. L’enjeu est de taille et permet de donner
à la guerrilla jardinière une perspective plus concrète et à plus long
terme. Aussitôt arrivé, des dizaines de personne s’affairent pour une partie
de kolkhoze autogéré. Le sol est plein de caillous et de briques, mais
qu’importe. On replante toute sorte de légumes, des arbres fruitiers.

Un escalier est fabriqué entre la rue et le terrain vague
pour en faciliter l’accès, des toilettes sèches sont commencées et pas mal de petites discussions s’engagent avec des gens du quartier sur le trottoir.
Il faudra peut-être un peu de temps pour qu’ils/elles s’approprient l’idée et osent venir, mais tous les espoirs sont permis. Je regrette juste qu’il
n’y ait pas ce soir là de discussions collectives sur la gestion et l’avenir du potager, ni de démarche collective pour annoncer l’occupation de la
friche aux habitant-e-s du coin. Mais l’action a pris pas mal d’énergie et
il est possible que tout cela se fasse petit à petit dans les prochains
jours. Des personnes dorment dès la première nuit sur le terrain et un
rendez-vous est pris dès le mercredi pour un repas de quartier sur le
potager. En face un théâtre, a invité un millier des ses adhérents pour
fêter sa destruction avec fanfare et feux d’artifices et l’ambiance est
assez décalée.

Juste avant de partir, quelqu’un m’amène une jeune homme qui veut comprendre
ce qui se passe. Il habite dans le quartier est étudiant en agriculture et
est complètement subjugué. Il faut un peu de temps pour qu’il assimile que
"non, on a pas demandé à la mairie, mais que ce n’est pas pour cela que l’on
ne va pas rester" et que l’on est pas ici pour se faire chacun-e- une
parcelle individuelle avec nos plantes mais des espaces et légumes
collectifs". Il rêve de disposer d’un espace pour expérimenter,planter des
fleurs et légumes mais n’aurait jamais osé en prendre un comme cela, alors
il veut revenir travailler sur cet espace et ses potes aussi.. Juste de quoi
se gonfler d’un peu d’optimisme avant de repartir au milieu de la nuit,
tandis que d’autres entament une nuit et un camp de base sur cet espace
transformé.

Longue vie aux occupations potagères en milieu urbain.

source : réseau sans-titre

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