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Arguments contre le traité nommé "Constitution Européenne"

Le NON dénonce le scandale des "verrous Giscard" imposés au texte

mardi 12 avril 2005

0. Ceci n’est pas une Constitution.

a) Une constitution est un ensemble de règles simples, adoptées par une assemblée constituante élue par le suffrage universel. Cela n’est pas le cas ici.

b) Une constitution est un texte qui fixe les grandes règles juridiques et démocratiques d’un Etat. Cela n’est pas le cas ici. Ce texte doit être compréhensible et à la portée de tous. Ceci n’est pas le cas. Le présent texte compte 340 pages, alors que la constitution des USA en comptait 14, celle de la France une trentaine.

c) Cette constitution est en fait un traité économique que l’on veut nous faire passer pour une constitution. Il reprend dans ces grandes lignes les traités précédents et fixe les politiques économiques qui doivent être mener en Europe et prime sur tout autres considérations sociales et écologiques par exemple.

d) Dans ce texte, on trouve 78 fois le mot « marché », 72 fois le mot « concurrence ». Le mot « progrès social » n’apparaît qu’une fois.

1. Une Union Européenne militariste et pilier de l’OTAN.

Art. I-41-3 :/ (…) Les Etats membres s’engagent à améliorer progressivement leur capacité militaire./

Art. I-41-2 : /Les politiques de l’Union (..) respecte les obligations découlant du traité de l’atlantique Nord pour certains Etats membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’OTAN et elle est compatible avec la politique commune de sécurité arrêtée dans ce cadre./

Art. I.41.7 : /Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la charte des Nations unies. Cela n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres. *Les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’OTAN*, qui reste, pour les États qui en sont membres*, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en oeuvre*./

_Commentaire_ : L’indépendance de l’Union Européenne est un leurre. Le texte du projet, vis à vis de l’OTAN (dont le commandement suprême est aux Etats Unis) est très explicite. D’ailleurs, Tony Blair en a fait l’un des ses arguments dans son livre blanc à la chambre des Communes (parlement britannique), en faveur du « oui ». En effet, non seulement l’Europe proposée serait militariste, dans l’obligation d’augmenter les dépenses militaires et sa politique de sécurité compatible avec l’OTAN. L’OTAN constitutionnalisé, on croit rêver ! Il ne faudra pas espérer attendre, avec une pareille Union Européenne, un non alignement sur la politique des Etats Unis, ou des pressions fermes sur Israël dans les territoires occupés. L’article III-131 de la partie III (la plus ultra-libérale du traité) précise même de manière surréaliste/ : « Les Etats membres se consultent »/ en cas de guerre pour /« éviter »/ que le fonctionnement du /« marché intérieur n’en soit affecté » / !

2. Une Union Européenne anti-démocratique.

Art. I-47-4 : /Des citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatifs /[combien ?]/ d’Etats membres peuvent prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre des ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire, aux fins de l’application de la Constitution (…)./

_Commentaire:_ Cette nouvelle possibilité, inscrite dans la Constitution, comme mesure de « démocratie participative » a été abondamment popularisée par les partisans du « oui ». Les Verts, par exemple, dans certaines professions de foi aux élections Européennes ont fait croire aux électeurs que /« un million de citoyens pourraient proposer par pétition une loi Européenne »./ En fait, il n’en est rien, comme l’indique clairement le texte. Un million de citoyens peuvent /« inviter »/ la Commission, et cette loi doit s’appliquer dans le cadre de la Constitution ! Au regard de la partie III qui impose les politiques libérales à l’Union, cette attribution reste sérieusement limitée ! Bref, non seulement la Commission fait ce qu’elle veut de cette pétition (et actuellement la Commission est plus à droite que jamais ..) mais en plus la loi doit respecter le contexte ultra libéral de l’Union !

Art. I-20-1 : /Le Parlement européen (…) élit le président de la Commission/.

Art. I-27-1 : /En tenant compte /[comment ?]/ des élections au Parlement européen, et après avoir procédé aux consultations appropriées /[ des tractations de couloir ?],/ le Conseil Européen /[constitué des membres des gouvernements],/ statuant à majorité qualifiée, propose au Parlement européen un candidat à la fonction de président de la Commission (…)./

_Commentaire_ : Ce sont donc les gouvernements qui choisissent, le parlement étant prié d’entériner leurs choix. Tenir compte du résultat des élections, n’autorise pas à penser que la Commission reflèterait les rapports de force issus du suffrage universel.

3. Un gouvernement de technocrates non élus.

Art. I-26-1 : /La Commission promeut l’intérêt général de l’Union et prend les initiatives appropriées à cette fin. Elle veille à l’application de la Constitution ainsi que des mesures adoptées par les institutions en vertu de celle ci. Elle surveille l’application du droit de l’Union sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union Européenne. Elle exécute le budget et gère les programmes. Elle exerce les fonctions de coordination, d’exécutions et de gestion conformément aux conditions prévues par la Constitution. A l’exception de la politique étrangère et de sécurité commune et les autres cas prévus par la Constitution, elle assure la représentation extérieure de l’Union. Elle prend les initiatives de la programmation annuelle et pluriannuelle de l’Union pour parvenir à des accords interinstitutionnels./

Art I-26-2 : /Un acte législatif ne peut être adopté que sur la proposition de la Commission/ (…)

Art I-26-4 : /Les membres de la Commission sont choisis en raison de leur compétence générale et de leur engagement Européen et parmi des personnalités offrant toute garantie d’indépendance./

_Commentaire:_ Les articles sont ici très clairs et explicites. Les attributions exorbitantes d’une Commission non élue qui dispose de pouvoirs législatifs, exécutifs, mais aussi judiciaire. Une telle concentration des pouvoirs dans les mains de personnalités « indépendantes » (indépendantes, comme le président actuel de la Commission, le très atlantiste M. Barosso ?). Nous sommes même ici en régression par rapport à la philosophie de Montesquieu de la séparation des pouvoirs ! Le parlement n’a donc aucun pouvoir … On se demande comment la majorité des parlementaires (y compris au PS et chez les Verts) ont pu voter une telle limitation de leur prérogatives.

4. La précarité et la flexibilité des travailleurs inscrites comme valeur suprême de l’Union

Art II-75-1 : /Toute personne a le droit de travailler et d’exercer une profession librement choisie ou acceptée./

Art II-75-2 : /Tout citoyen de l’Union a la liberté de chercher un emploi, de travailler, de s’établir ou de fournir des services dans tout Etat membre./

Art III-203 : /L’Union et les Etats membres s’attachent (…) à promouvoir une main d’œuvre qualifiée, formée et susceptible de s’adapter ainsi que des marchés du travail aptes à réagir rapidement à l’évolution de l’économie (…)./

_Commentaire _ : Il y a une différence entre le « droit au travail » prôné par différentes Constitutions nationales,et le « droit de travailler », car le droit au travail est lié au code du travail, ce n’est pas le cas lorsque l’on proclame le droit de travailler. Cet article entérine un recul de 150 ans en arrière, puisque le droit au travail était déjà une revendication des révolutionnaires de 1848 en France. Cette proclamation est en recul par rapport à *l’article 23 de la déclaration universelle de l’ONU* de 1948 (à laquelle l’Union Européenne n’est pas juridiquement adhérente) qui stipule : */« toute personne a droit au travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage/*/ ». /De même il n’est pas fait référence à une durée légale du travail. Rappelons que le commission *déréglemente le droit du travail et veut étendre le contingent d’heures supplémentaires à 60 heures et au delà*. D’autre part, la liberté de « chercher un emploi » entérine les situations de chômage. L’article III-203 proclame lui l’/adaptation/ et la flexibilité des travailleurs, sommés de s’adapter au marché …

5.1 Charte des Droits Fondamentaux : attention aux apparences !

*Préambule * : /.. (l’Union) cherche à promouvoir un développement équilibré et durable et assure la libre circulation des personnes, *des services, des marchandises et des capitaux*, ainsi que la liberté d’établissement./

_Commentaire_ : La circulation des marchandises et des capitaux est mise sur un même pied d’égalité que les la circulation des personnes dans une CHARTE des DROITS fondamentaux de la personne. On ne saurait mieux définir le libéralisme économique.

Art. II.88 : */Les travailleurs et les employeurs/*/, ou leurs organisations respectives, ont, *conformément au droit de l’Union et aux législations et pratiques nationales*, le droit de négocier et de conclure des conventions collectives aux niveaux appropriés et de recourir, en cas de conflits d’intérêts, à *des actions collectives pour la défense de leurs intérêts, y compris la grève*./

_Commentaire _ : derrière les apparences, ce droit important, fondateur de la tradition sociale en Europe depuis un siècle au moins est renvoyé aux pratiques et législations nationales. *Il n’engage donc pas l’Union en tant que telle *contrairement aux autres « droits » (devoirs) économiques de la partie III. Le droit de grève est reconnu aux travailleurs, certes, mais il est aussi reconnu aux employeurs. Le *lock-out*, *illicite en France,* devient ainsi une action légale dans l’Union européenne.

Art. II.94.1 / : L’Union *reconnaît et respecte* le droit d’accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux assurant une protection dans des cas tels que la maternité, la maladie, les accidents du travail, la dépendance ou la vieillesse, ainsi qu’en cas de perte d’emploi, selon les règles *établies par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales*./

Art. II.94.2 : /Afin de lutte contre l’exclusion sociale et la pauvreté l’Union reconnaît et respecte le droit à une aide sociale et à une *aide au logement* destinées à assurer une existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, *selon les règles établies par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales*/.

_Commentaire_ : L’expression "reconnaît et respecte" apparaît fréquemment dans les articles du traité. Ce qui est un droit, une garantie imprescriptible, *aussi bien dans la Déclaration universelle de l’ONU, que dans la constitution de 1958* (France) est relégué au rang de coutume, respectable certes, mais qui n’a plus rien de contraignant. Pour rappel, *l’article 25* *de la déclaration de l’ONU* stipule que toute personne /« a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté »./ L’aide au logement n’est pas le droit au logement proclamé par différentes constitutions nationales et l’ONU (art. 25) : *« /Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et celui de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires / »*

*De manière générale, dans le préambule des constitutions des Etats suivants : France, Belgique, Allemagne, Danemark, Espagne, Finlande, Italie, Pays Bas, Irlande, Portugal, Suède, est* *affirmé le principe du droit au travail, du droit à un revenu minimum, à une allocation chômage, à une pension de retraite, à une couverture de santé, à un logement décent. Rien de tout cela dans la Charte de l’Union*.

5.2 Une Charte des Droits Fondamentaux à portée limitée !

Art. II.111.2 : /La présente Charte *n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union* au-delà des compétences de l’Union, ni *ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelles pour l’Union* *et ne modifie pas les compétences et tâches définies dans les autres parties de la Constitution*./

_Commentaire_ : L’article a le mérite d’être clair : les droits reconnus, souvent du bout des lèvres, dans la Charte *ont une portée restreinte, et ne peuvent avoir la prééminence sur les articles contenus dans les autres parties du traité constitutionnel.*

*Préambule de la charte* : /(…) la charte sera interprétée par les juridictions de l’Union et des Etats membres en prenant dument en considération les explications établies établies sous l’autorité du présidium de la Convention qui a élaboré la Charte /[M. Giscard d’Estaing]/ et mises à jour sous la responsabilité du praesidium de la Convention Européenne/.

*La Charte a donc d’emblée une portée limitée*. Dans ce préambule, ainsi que dans *l’article II.112*, le texte crée à l’avance des jurisprudence, ce qui limite la portée générale du texte de la Charte (tout comme la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme devient dans l’article I.9.3 un principe général, ce qui juridiquement n’engage pas l’Union). Nous publions quelques extraits de ces « explications » données par Giscard d’Estaing, initiateur du texte et qui, le lecteur en sera juge, en réduisent sensiblement la portée.

*Article II-62* /Droit à la vie /

/1. Toute personne a droit à la vie. /

/2. Nul ne peut être condamné à la peine de mort, ni exécuté. /

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« La mort n’est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d’un recours à la force rendu absolument nécessaire » (article 2 du protocole nº 6 annexé à la CEDH). « Un État peut prévoir dans sa législation la peine de mort pour des actes commis en temps de guerre ou de danger imminent de guerre ; une telle peine ne sera appliquée que dans les cas prévus par cette législation et conformément à ses dispositions... » /

*Article II-66*/ Droit à la liberté et à la sûreté /

/Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. /

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : [...] s’il s’agit de la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond ; s’il s’agit de l’arrestation ou de la détention régulières d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours. » /

*Article II-72* /Liberté de réunion et d’association Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique./

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« [...] L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’État. »/

*Article II-74.* /Droit à l’éducation Toute personne a droit à l’éducation, ainsi qu’à l’accès à la formation professionnelle et continue. Ce droit comporte la faculté de suivre gratuitement l’enseignement obligatoire./

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« [...] Tel qu’il est formulé, le principe de gratuité de l’enseignement implique seulement que, pour l’enseignement obligatoire, chaque enfant ait la possibilité d’accéder à un établissement qui pratique la gratuité. Il n’impose pas que tous les établissements, notamment privés, qui dispensent cet enseignement ou une formation professionnelle et continue soient gratuits. Il n’interdit pas non plus que certaines formes spécifiques d’enseignement puissent être payantes, dès lors que l’État prend des mesures destinées à octroyer une compensation financière. Dans la mesure où la charte s’applique à l’Union, cela signifie que, dans le cadre de ses politiques de formation, l’Union doit respecter la gratuité de l’enseignement obligatoire, mais cela ne crée bien entendu pas de nouvelles compétences. » /

*Article II-79* /Protection en cas d’éloignement, d’expulsion et d’extradition :/

/1. Les expulsions collectives sont interdites. /

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« Le paragraphe 1 vise à garantir que chaque décision fait l’objet d’un examen spécifique et que l’on ne pourra décider par une mesure unique d’expulser toutes les personnes ayant la nationalité d’un État déterminé. » /

*Article II-81* /Non-discrimination /

/1. Est interdite toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle. /

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« Le paragraphe 1 ne confère aucune compétence pour adopter des lois antidiscrimination dans ces domaines de l’action des États membres ou des particuliers, pas plus qu’il n’énonce une large interdiction de la discrimination dans lesdits domaines. En fait, il ne concerne que les discriminations qui sont le fait des institutions et organes de l’Union. » /

*Article II-88* /Droit de négociation et d’actions collectives Les travailleurs et les employeurs, ou leurs organisations respectives, ont, conformément au droit de l’Union et aux législations et pratiques nationales, le droit de négocier et de conclure des conventions collectives aux niveaux appropriés et de recourir, en cas de conflits d’intérêts, à des actions collectives pour la défense de leurs intérêts, y compris la grève. /

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« [...] Les modalités et limites de l’exercice des actions collectives, parmi lesquelles la grève, relèvent des législations et des pratiques nationales, y compris la question de savoir si elles peuvent être menées de façon parallèle dans plusieurs États membres. » /

*Article II-94* /Sécurité sociale et aide sociale L’Union reconnaît et respecte le droit d’accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux assurant une protection dans des cas tels que la maternité, la maladie, les accidents du travail, la dépendance ou la vieillesse, ainsi qu’en cas de perte d’emploi, selon les règles établies par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales./

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« [...] La référence à des services sociaux vise les cas dans lesquels de tels services ont été instaurés pour assurer certaines prestations, mais n’implique aucunement que de tels services doivent être créés quand il n’en existe pas. » /

*Article II-96* /Accès aux services d’intérêt économique général L’Union reconnaît et respecte l’accès aux services d’intérêt économique général tel qu’il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la constitution, afin d promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union./

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« Cet article est pleinement conforme à l’article III-122 de la constitution et ne crée pas de droit nouveau. Il pose seulement le principe du respect par l’Union de l’accès aux services d’intérêt économique général tel qu’il est prévu par les dispositions nationales, dès lors que ces dispositions sont compatibles avec le droit de l’Union. » /

*Article II-111* /Champ d’application La présente charte n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au-delà des compétences de l’Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelles pour l’Union, et ne modifie pas les compétences et tâches définies dans les autres parties de la constitution [...]./

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« En ce qui concerne les États membres, il résulte sans ambiguïté de la jurisprudence de la Cour que l’obligation de respecter les droits fondamentaux définis dans le cadre de l’Union ne s’impose aux États membres que lorsqu’ils agissent dans le champ du droit de l’Union. [...] La charte ne peut avoir pour effet d’étendre les compétences et tâches conférées à l’Union par les autres parties de la constitution. Il s’agit de mentionner de façon explicite ce qui découle logiquement du principe de subsidiarité et du fait que l’Union ne dispose que de compétences d’attribution*. Les droits fondamentaux tels qu’ils sont garantis dans l’Union ne produisent d’effet que dans le cadre de ces compétences déterminées par les parties I et III de la constitution.* » /

*Article II-112* /Portée et interprétation des droits et des principes [...] Dans la mesure où la présente charte reconnaît des droits fondamentaux tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, ces droits doivent être interprétés en harmonie avec lesdites traditions. Les dispositions de la présente charte qui contiennent des principes peuvent être mises en oeuvre par des actes législatifs et exécutifs pris par les institutions, organes et organismes de l’Union, et par des actes des États membres lorsqu’ils mettent en oeuvre le droit de l’Union, dans l’exercice de leurs compétences respectives. Leur invocation devant le juge n’est admise que pour l’interprétation et le contrôle de la légalité de tels actes. [...] Les explications élaborées en vue de guider l’interprétation de la charte des droits fondamentaux sont dûment prises en considération par les juridictions de l’Union et des États membres. /

*Explications établies sous l’autorité du praesidium de la Convention européenne : *

/« [...] Des restrictions peuvent être apportées à l’exercice des droits fondamentaux, notamment dans le cadre d’une organisation commune de marché, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par la Communauté et ne constituent pas par rapport au bu poursuivi une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même de ces droits [...]. »/

6. La taxation des capitaux est interdite.

Art. III-156 : /Dans ce cadre de la présente section /[« Capitaux et paiements »],/ les restrictions tant aux mouvements de capitaux, qu’aux paiements entre les Etats membres et les pays Tiers sont interdites./

Art. III-157-2 : /Le parlement Européen et le Conseil s’efforcent de réaliser l’objectif de libre circulation des capitaux entre Etats membres et pays tiers, dans la plus large mesure possible et sans préjudice d’autres dispositions de la constitution./

_Commentaire_ : C’est le bouquet ! En fait le fond inavouable de ce traité. C’est bien la première fois dans l’Histoire des constitutions, qu’un parlement élu au suffrage universel devrait respecter la libre circulation des capitaux (Art. III-157-2), pilier de la doctrine et de l’économie ultra libérale. Autrement dit, il s’agit bien d’un viol de la volonté des électeurs qui élirait un parlement opposé au néolibéralisme. Le traite va très loin puisqu’il interdit toute restriction aux mouvements de capitaux , type Taxe Tobin, l’un des fondements d’Attac. On ne pourra rien changer à cette situation, car il suffira qu’un Etat s’oppose à tout changement (le Luxembourg par exemple) pour que cette disposition soit maintenue.

7. La Concurrence, devenue un dogme de l’Union Européenne : les services publics passent à la trappe.

Le thème de l’économie de marché « ouverte » où la « concurrence est libre et non faussée » revient comme un leitmotiv dans tout le projet de Constitution. Il est aussi dit que le développement de l’Europe est fondé sur une économie de marché « hautement compétitive » (art. I-3,2). Il n’y a que dans l’article I-3,3 que cette économie « hautement compétitive » est qualifiée de « sociale ». Partout ailleurs où cette économie de marché « hautement compétitive » est explicitée, *elle n’est plus jamais qualifiée de « sociale » (art. III-170 ; III-178 et III-185).* On parle alors simplement et directement d’une « économie de marché ouverte où la concurrence est libre » (art. III-177 et III-185). La partie III du traité est très explicite sur les politiques ultra libérales. Un exemple :

Art. III-209 : /(…) L’Union et les Etats membres agissent en tenant compte de la diversité des pratiques nationales, en particulier dans le domaine des relations conventionnelles, ainsi que de la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de l’Union/ .

Fidèle au traité de l’AGCS, au sein de l’OMC, La libéralisation des services est vivement encouragée par l’article suivant :

Art. III-148 : /Les Etats membres, s’efforcent de procéder à la libéralisation des services au delà de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi cadre européenne adoptée en application de l’article III-147 (…)/ [qui porte sur la procédure de libéralisation].

Sur le point des services publics (écoles, hôpitaux etc.), le projet est même en recul par rapport au traité de Nice, et n’apparaît pas dans les objectifs de l’Union (Art. I-3) alors que la « /concurrence libre et non faussée/ » est un des objectifs de l’Union, et même le deuxième ! (Art. I-3-2). Le projet remplace le mot « service public » par le terme « service d’intérêt économique général ». On notera l’adjectif « économique » de tels services, devenus rentables. L’article suivant impose la règle de concurrence à ces services :

Art. III-166-2 :/ Les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant un caractère de monopole fiscal sont soumises aux dispositions de la constitution, notamment aux règles de la concurrence, dans la mesure où l’application de ses dispositions ne fait pas échec en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été impartie./

Art. III-167-1 : /Sauf dérogations prévues par la constitution /[mais les dérogations ne prévoient pas les cas de non concurrence]/, sont incompatibles avec le marché intérieur (…) les aides accordées par les Etats membres ou au moyen des ressources de l’Etat sous quelque forme que ce soit qui fausse ou qui menace de fausser la concurrence./

_Commentaire_ : L’article III-132 prévoit même qu’un Etat membre ou la Commission Européenne peut saisir la Cour de Justice s’il estime qu’un Etat fait un usage « abusif » des dérogations aux règles de la concurrence accordée pour les services d’intérêt économique général. Et la cour de Justice statue à « huit clos » est-il précisé dans ce même article …

Art. III.238 / : Sont compatibles avec la constitution, les aides qui correspondent aux besoins de la coordination des transports des transports ou qui correspondent au remboursement de certaines *servitudes* inhérentes à la notion de service public/.

_Commentaire_ : c’est la seule fois ou la notion de service public est mentionnée dans ce texte, et restreinte au domaine des transports. Le terme servitude associé aux services publics résume assez bien l’idéologie sous jacente au texte constitutionnel.

8. Une banque Centrale hors de tout contrôle

Art III-188 : (…) /Ni la banque centrale européenne, ni une banque centrale nationale, ni un membre quelconque de leurs organes de décision ne peuvent solliciter ni accepter des instructions des institutions, organes ou organismes de l’Union, des gouvernements des Etats membres ou de tout autre organisme. Les institutions, organes ou organismes de l’Union ainsi que les gouvernements des Etats membres s’engagent à respecter ce principe et à ne pas chercher à influencer les membres des organes de décision de la Banque centrale européenne ou des banques centrales nationales dans l’accomplissement de leur mission./

_Commentaire_ : Cet article est repris du traité de Maastricht. Il soustrait le conseil des gouverneurs de la banque centrale - la plus occulte des institutions européennes - à tout contrôle démocratique. Ici, l’Europe s’affirme encore plus libérale que les Etats unis, puisque la fed (Banque Fédérale US) dépend encore du contrôle du gouvernement américain. Cette indépendance affirmée n’est qu’une façade. Car en fait, rien n’interdit les banquiers centraux de prendre leurs consignes auprès des milieux d’affaire et lobbies financiers. La /« stabilité des prix »/ (Art I-3-3) devient un des objectifs prioritaires de l’Union, et donc de sa Banque Centrale, alors que la formation ou la lutte contre le chômage n’y figurent pas !

*9. L’harmonisation sociale et fiscale est exclue par le texte.*

Article III-172 : -1 /« La loi ou la loi-cadre européenne établit
les mesures relatives au rapprochement des dispositions
législatives, réglementaires et administratives des États membres
qui ont pour objet l’établissement ou le fonctionnement du marché
intérieur » /-2/ //« Le paragraphe 1 ne s’applique pas aux
dispositions fiscales, aux dispositions relatives à la libre
circulation des personnes et à celles relatives aux droits et
intérêts des travailleurs salariés ».///

_Commentaire_ : L’harmonisation fiscale est explicitement exclue du champ d’intervention des lois et lois-cadres européennes. Elle l’est aussi dans le cadre de l’Article III-210 -2 b) : « /Cette loi-cadre européenne évite d’imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu’elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises »./

*l’Article III-209*/ : « L’Union et les États membres, conscients des droits sociaux fondamentaux, tels que ceux énoncés dans la Charte sociale européenne signée à Turin le 18 octobre 1961 et dans la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989, ont pour objectifs la promotion de l’emploi, l’amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès, une protection sociale adéquate … l’Union et les États membres agissent en tenant compte de la diversité des pratiques nationales, en particulier dans le domaine des relations conventionnelles, ainsi que de la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de l’Union. *… Ils estiment qu’une telle évolution résultera tant du fonctionnement du marché intérieur*, qui favorisera l’harmonisation des systèmes sociaux, que des procédures prévues par la Constitution et du rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives. »/

_Commentaire_ : seule la concurrence devrait permettre l’harmonisation sociale …

Nous sommes confrontés à un projet de Constitution qui d’un coté organise la mobilité des travailleurs et des entreprises (ainsi que l’adaptabilité du travail au marché intérieur) dans le cadre des compétences exclusives ou partagées de l’Union s’imposant donc aux Etats et d’un autre coté dans le cadre de la subsidiarité de l’Union qui laisse aux Etats le soin d’établir leur propre règle en terme de droits sociaux et de fiscalité d’entreprise, favorisant ainsi dans le cadre du marché concurrentiel les pays ayant des droits sociaux peu développés et une législation fiscale favorable aux entreprises. Ceci pose la question d’une législation du droit social harmonisée par le haut par l’intermédiaire de loi ou loi-cadre européenne ainsi que d’une harmonisation fiscale sur les entreprises. Ces modifications sont en fait rendues impossibles par le mode de révision du texte (voir partie 10)

10. Une camisole de force verrouillée pour des décennies.

Art IV-443-3 : /Une conférence des représentants, des gouvernements des Etats membres est convoquée par le président du Conseil en vue d’arrêter d’un commun accord les modifications à apporter au présent traité. Les modifications entrent en vigueur après avoir été ratifié par tous les Etats membres conformément à leur règle constitutionnelle respective./

Allons nous voir le bout de l’Autre Europe (sociale) de notre vivant ? Pas sur avec un tel texte. Au terme d’une procédure très lourde qui comporte la réunion d’une Convention puis d’une conférence Inter-Gouvernementale, une double unanimité est requise. Celle des gouvernements des Etats membres, puis celle de leurs parlements, ou de leur peuple en cas de procédure référendaire. De quoi bloquer tout évolution ultérieure. *Il existe une procédure dite de révision simplifiée* (*Art. IV 445*) vantée par certains partisans du « oui » (DSK). Cette procédure d’une part ne peut porter que sur la partie III du traité. *Le titre 1 de cet article* par exemple, autorise le parlement Européen à soumettre des projets au Conseil Européen, pour réviser certaines dispositions de la partie III. Mais, là encore cette modification a besoin, pour entrer en vigueur, de l’approbation de tous les Etats membres (*titre 3* *de l’art. IV 445*)). Il s’agit bien d’une camisole de force ultra libérale qu’on veut nous faire endosser pour des décennies …

source : FZ

première mise en ligne : 15 janvier 2005

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