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Constitution européenne, après le "non" ?

mardi 7 juin 2005

Rencontre autour de l’après référendum à Strasbourg, bilan et perspective d’un acte fondateur au caractère de réunification et d’espérance…

Les signataires de l’engagement des « 200 » qui a rassemblé pour une victoire du « non » ne s’attendaient sûrement pas à une telle mobilisation citoyenne et leur espoir reste égale aux valeurs de leurs revendications même si aux égards d’une certaine vulgarisation explicative certaines des réalités risquent de ne toujours pas être prises en compte. Si l’Alsace au soir du résultat se félicitait qu’en tant que région du centre parlementaire européen elle eût fidèlement acceptée le « oui » au projet de constitution, elle n’en demeure pas moins aussi le fief d’un militantisme qui a rassemblé au plus grand nombre ses réunions et son meeting comme nulle part ailleurs en France pour cette gauche, exceptées les circonscriptions rattachées à la région parisienne. Ils furent donc encore une bonne centaine à s’être rendue sur place pour faire évoluer leurs revendications et leur choix électoral vers une continuité ultérieure donnant rendez-vous à la mi-juin où se réunira les 16 et 17 à Strasbourg la cour du Conseil européen pour prendre, souhaitons-le, à considération le changement de perspectives qu’institue le rejet d’un projet européen qui se vouait à muer en Constitution.

Ce choix politique s’est peu à peu construit dans la recherche d’un partage d’opinions et d’une ouverture sur un débat auquel n’ont pas hésité à se regrouper les représentants d’ATTAC, les écologistes qui finalement ont majoritairement choisi l’option de l’alternative que proposait le « non » ainsi que les délégués des formations politiques dites classiques des gauches françaises et affiliées (PS du courant Fabius, gauche version république de Chevènement, PCF et PCOF et certains délégués syndicaux comme la CGT et FO). Sous ce directoire constitutif d’une assemblée aux prises de parole ouvertes à toutes personnes et une fois passée l’objectif d’assurer aux suites d’une structure à conserver l’évidente souveraineté que le mouvement entamé il y a six mois permet d’envisager l’avenir pour l’unité d’une véritable gauche qui travaillerait à la pérennité des engagements sans pour autant sombrer inéluctablement sur l’avatar d’une récupération politique à laquelle il serait difficile d’échapper et qui se présente pourtant comme étant presque inévitable. Marcel Wolff, le porte-parole du collectif lorsqu’il présente la démarche de ce mouvement, insiste bien sur les « diverses obédiences politiques avec ou sans références d’attaches politiques » venues témoigner de leur désir de poursuivre la construction d’une « autre Europe », terme dont évidemment les élites dirigeantes refusent de considérer l’ampleur. A ce sujet des analystes mettent en valeur la quasi certitude que si des référendums avaient été organisés en Italie et en Allemagne ils se seraient achevés par la conclusion d’une majorité pour le refus de la constitution ce qui au reflet du résultat place les gouvernements sur la sellette puisque l’Assemblée française aurait parachevé l’impasse Schengen dans l’apothéose de 90% des députés qui l’aurait ratifiée alors que les urnes démontrent le contraire puisque c’est à près de 56% que les électeurs ont préféré ralentir le processus ce qui est ma fois assez compréhensif lorsqu’on tient compte d’une Europe où un peu partout s’établissent des salaires au plus bas et des prix au plus haut. Voilà une situation qui marque le besoin d’un changement « intérieur » dans les pays de l’Union européenne mais extérieurement il aurait quand même été plus probant d’organiser une date référendaire commune une fois tous les pays intégrés dans l’espace qui leur est proposé plutôt que de laisser s’égrainer dans des confrontations électorales à la carte et au coup par coup l’ensemble d’une cohésion européenne qui s’en est allée s’étiolant au fur et à mesure dans l’inadéquation et l’inaptitude pour se transformer de nécessité qu’elle fut en besoin absolu d’en redéfinir les contours organisationnels.

A plus d’un titre nous pouvons et estimons légitimes d’en revoir les engagements et les participations pour l’extirper de son surplomb économique et de la charge politique inspirée du libéralisme qu’elle n’a pas à promouvoir puisqu’elle est la base même de l’inégalité et des ruptures des pactes paritaire et de stabilité même si les éminences économistes y voient là une supercherie supplémentaire destinée à mieux se jouer des plus-values que sont susceptibles d’apporter toute ouverture d’un espace marchand. L’économie marchande doit être une base des termes de l’échange et non une monarchie directionnelle. Et plutôt que de se chamailler sur la question de la Turquie il serait plus urgent de faire appliquer les normes européennes à un pays comme la Russie qui possède au nord ouest l’une des plus grandes concentration d’installations utilisant le nucléaire dans des conditions d’équipements aux limites de la détérioration autorisée - ce site se situe sur la carte aux communes rattachées au lieu dit « la mer Blanche » -, sans même insister sur des cas où le respect des droits de l’homme ne font toujours pas office de loi, ni sur le marché à l’uranium dont la Russie de Poutine se veut le tremplin avec l’Iran et la confusion que cela fait peser sur la diplomatie des équilibres nucléaires.

En recherche d’une durée et d’une efficacité et dans le respect de la diversité des approches il est démocratiquement convenu que le collectif allait demander une renégociation du projet de traité pour une constitution après s’être longtemps interrogé sur le déni médiatique allant à l’encontre de la victoire effective sur le terrain prouvant de ce fait à ceux-ci que leur caractère de médias dominants - encore faudrait-il s’en inquiéter puisque cette définition coupe court à tout principe de « libre concurrence », n’allons nous pas là vers l’uniformisation d’un discours transmué en langage condamnant toute perspective intellectuelle - ne devait pas leur faire oublier qu’à l’article 4.453 s’instituait l’impossibilité de changement. Ce qui permet aux politiques de se comporter comme si rien ne s’était passé. Ainsi mise en question une certaine forme de non application du devoir de démocratie qui envisage de rejeter l’objectif de ratification unanime pour le réduire à moins cinq membres refusant qui n’auraient pas de valeur sur lesquels les autres membres s’obligeraient quand même au passage à la ratification ; le bras de fer ainsi engagé entre des pays non signataires et les menaces d’abandon laisse perplexe quand à la solidité de cette construction européenne. Les marques de l’impossibilité à prendre en considération dans un travail achevé ce qui n’a jamais été pris en compte en démontrent la friabilité. L’emporte pièce et la précipitation de l’auto proclamation gouvernementale sans passer par l’outil référendaire en révèlent l’aspect totalitaire issu d’une dictature économique symbolisant toute la faille de l’orientation politique qui lui est sous-jacente.

Dans l’effervescence de ces plus de 1000 collectifs installés par urgence dans toute la France et bien conscient que rien n’est gagné et que c’est maintenant que le travail commence si l’ensemble des dirigeants politiques souhaitent tenir compte d’une réalité politique. Le résultat du rassemblement autour du « non » de gauche provenant d’instances politiques parfois divergentes et en tous cas hétéroclites veut surmonter les problèmes politiques que cet éclectisme risquerait de soulever pour envisager l’avenir autour de la poursuite d’une réflexion menée dans le but d’envisager l’Europe sous d’autres aspects dans l’appellation temporaire de mouvement d’une « Europe sociale et démocratique » dont le citoyen une fois retourné à ses partis politiques respectifs prendrait les choses en mains sachant que ces partis sont là pour les y aider pour certainement aboutir à l’organisation d’« Assises rhénanes pour une autre Europe » ce qui permettrait de redonner un caractère entièrement frontalier à une ville comme Strasbourg. Mais le premier rendez-vous est fixé au Parlement où il sera demandé à la France de « retirer sa signature du traité » ainsi que formulée une demande d’activation de la suppression des « directives inacceptables » notamment au sujet des projets relatifs à l’augmentation du temps de travail, à la lecture entre les lignes du « programme Bolkenstein » et au « démantèlement des services publics » pour ne citer que les principales incohérences que ce projet a pu insuffler durant les réflexions qui n’auront que trop marquées les différences entre un texte théorique et le vécu des populations ; orientation allant jusqu’à parler de « concurrence vers le bas » qui maintenant en appelle à un véritable changement dans un « processus d’émancipation et de transformation sociale » seule conclusion acceptable à une victoire collective digne et retenue, sans appropriation personnelle, dont la méthode de travail est à conserver car son résultat aura montré au politique (le politique) comment il devrait fonctionner s’il était vraiment démocratique. Dès lors est lancé une profonde remise en cause de ce refus de toute construction européenne émise par une idéologie propagandiste qui refuse d’accepter la dynamique d’une autre Europe qui pourtant veut passer par le « non » - et se l’est prouvée - pour dépasser une Europe libérale par défaut.

Questions de démocratie et de social qui cherchent à se faire considérer ne pouvant aller vraiment contre la démocratie, on imagine le brûlot que la tôlée produira sur les solides sièges des commissions bruxelloises et strasbourgeoises lorsqu’elles seront confrontées à ce camp du « non » passé au peuple du « non » qui leur demande de construire un programme pour que ce peuple puisse dire « oui » à quelque chose car il est entendu, et il faut insister là-dessus, qu’il n’a jamais été question d’arrêter l’évolution du processus européen mais de rejeter une construction constitutionnelle trop orientée aux services d’un haut monarchique à l’espoir du bas dont le « non » n’a de fondement que de se faire entendre.

Laurent Chrétien - Gantner

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