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Constitution européenne - Campagne mai 2005

Pour l’instant c’est "non" !

vendredi 27 mai 2005

Alors pour rester en dehors de la blague, on aura beau dénoncer une Europe qui danse sur une jambe de bois et ne regarde que d’un œil quand ce n’es t pas que d’une seule partie du cerveau qu’elles réfléchissent ces droites réunies en une seule par sa même extrême ; encourager au « non » du Jour humain, décrier l’importance accordée au rôle de la France au moment où il faudrait penser en terme d’Europe et savoir dépasser le principe de la notion de nation comme si notre pays ne pouvait se permettre, ne se devait en aucun cas de partager cette supériorité, de constater qu’il ne s’agit finalement que d’un « oui » à l’envers donc doublement d’un « non » pour effacer le manque de conscience politique qui ressort des partenaires du « oui » opposés dans « leur » Europe à une ferme volonté de réellement changer les visées contextuelles et textuelles que le capitalisme cherche à infliger à ce continent à travers une Constitution qui ne fait pas l’unanimité mais qui dors et déjà, quelque en soit le résultat, remportera sa partie d’une faible marge entre un faible « oui » et un « non » que les sondages présentent comme plus costaud.

Saura-t-elle cette Europe entendre les orientations et les revendications des mouvements vraiment à gauche dont il est pour l’instant assez difficile d’évaluer de près les pourcentages électoraux ou préférera-t-elle poursuivre une route capitaliste pavée de bonnes intentions mais dont les résultats concrètement sur le terrain inspirent le pessimisme suite aux dangers de déséquilibres qui risquent de frapper chaque pays ? Il ne s’agira pas lorsqu’il faudra aller voter de choisir un programme à la carte de gestionnaires européens mais d’élire un programme de sécurité humaine qui soit plus vivable que les précédents, une charte de protection de la planète par rapport aux surmenages qu’elle se voit infliger par un rythme capitaliste devenu destructeur sur de nombreux domaines sous l’effets de dérapages technologiques, bios éthiques et « militarifiés ».
Du « oui » socialiste issu des courants socio démocrates ou socialistes libéraux également inscrits dans le schéma de la poursuite des politiques que nous avons vécues jusqu’ici se découvrent en réalité des sympathisants de gauche d’une faible teneur déjà rachetés par le libéralisme, démocratique lui aussi ; on voit derrière,se poindre la concrétisation d’une conscience politique réellement vouée au sort de tous et non pas d’une élite gestative agissant le plus souvent cachée qu’à visage découvert. Entre une gauche qui chamaille le « oui » ou le « non » et une droite pas forcément unanime, nul ne peut proférer ce qu’il adviendra du scrutin ni les arguments nouveaux qui pourraient y être ajoutés. La preuve en est cette antépénultième boutade envoyée par l’un des courants affilié à l’UMP et à sa libérale démocratie auprès de ses jeunesses subitement orientées vers le « non » certainement au cas où… celui-ci venait à l’emporter ! Là on frôle un cas limite et isolé de la bêtise idéologique et propagandiste mais après tout Jacques Chirac était bien un sympathisant communiste dans sa jeunesse, certainement par goût de l’infiltration pour mieux les exterminer et faire taire leurs rêve égalitaire. Le « non » m’apparaissant comme plus convainquant politiquement que le « oui » qui ferait bien de faire sien l’adage de Chirac à propos de l’assimilation à une moutonnerie de noirauds (c’te nouille de l’obscur), je voterai par conséquent « non » dans la perspective de rallier la cause de programmes politiques européens plus efficaces en terme d’égalité qu’en prose économique.

Et pourtant j’ai cru au « oui » par naïveté et condescendance globalisante. Mais voyant se multiplier les exposés contradictoires et de compromissions dès lors qu’un socialisme à faible teneur, une gauche margarine, oublie la base de son existence, la raison sociale de son existence en ne donnant pas de fauteuil en ses rangs aux représentants des plus basses couches de la société, le prolétariat international - encore que, nous apprend-on d’une de ces sources d’information à forte marque d’orientation idéologique, la masse ouvrière glisserait actuellement à droite ( ? !) - pour finalement espérer se tirer vers le haut sans son bas et enfin patauger dans une hypocrisie politique affligeante au mépris de la moindre décence historique. Lorsque j’envisageais l’Europe je me rendit rapidement compte que politiquement cela poserait des problèmes aux vues des expériences de cohabitation qui mirent leur temps à décanter au fur et à mesure que l’on tournait les pages de la mémoire prétextant l’urgence d’un changement nécessaire mais toujours plus orienté à droite. Certains pays sont censés obtenir de nouveaux droits de part leur entrée dans l’Union européenne alors que dans ceux où ils existent déjà on ne leur apporte aucune amélioration ; il faut parler ici de stagnation des droits, voire dans certains cas de régression alors que quasi unanimement les courants 100% à gauche d’Europe demandent effectivement à la France d’opter pour un « non » sévère peut-être mais certainement pas dangereux. En tous cas cette demande pose un argumentaire rafraîchissant la question du retour au politique capable d’apporter des programmes efficaces pour un vrai changement en réponse aux maintes situations de recommencement toujours rencontrées à chaque renouvellement des alternances qui se croyaient alternatives, aux uniques aptitudes à dépasser une rivalité politique réduite à se taire et à subir les règles d’un capitalisme exigeant, redevable qu’à ceux qui lui appartiennent, ne sortant jamais de sa caverne de l’investissement et du profit (pour la répartition tout est déjà prévu), vouant désespéramment et définitivement la société à des formes d’esclavagisme sophistiquées et évoluées aux prorata des améliorations qu’il espère apporter encore à son système social. Cela fait plus d’un siècle que la classe ouvrière se déchire entre une récupération droitière et l’oubli de son destin international historique qui devrait lui léguer la direction et l’utilisation de ses moyens de production… La gauche doit parler pour la gauche et non en faveur de la poursuite des régimes droitiers, question que n’a jamais soulevé les débats de l’après guerre de 1945. Le « oui » de gauche vendant son humanisme au plus offrant ne peut-être acceptable aux yeux du cercle des appartenances politiques et ne fera que perpétuer le règne des misères qui noircissent ce monde. Dès l’abandon des forces communistes, alliées gouvernementaux des débuts de l’Elysée socialiste, je ne pouvais que me demander si ce socialisme était réellement de gauche… On en aperçût les finalités qui sont strictement les mêmes que son opposant droitier dès lors qu’elles sont considérées sous l’aspect des carriéristes, des ambitieux, bref dès lors qu’elles sont prises dans leur forme personnelle et non pour la parole des représentants qui les ont élus.

La gauche européenne, amoindrie dans son « oui » autour de Schengen, a la piètre figure des espoirs avortés du mouvement qui l’a fit majoritaire à une époque. Laissons-là, à ce moment de l’histoire s’embourber dans ce capitalisme qu’elle a toujours convoité pour sa poche perdant de ses fondements pour rallier une sorte de moyenne bourgeoisie qui malheureusement n’est pas devenue plus nombreuse que le socle historique qui constitue les forces de la gauche représentative de la couche sociale la plus nombreuses ne visant pas qu’à soutenir des sous couches elles-mêmes exploitantes attitrées du prolétariat. Chercher ici la raison d’une brouille syndicale et la distance entre l’électeur et son élu n’explique pas tout mais évoque les problèmes que soulève l’utilisation de médiateurs. C’est là un problème de liaison par le haut, situation inacceptable au sens où elle établie une relation de distanciation avec les revendications et leur prise en compte par les instances décisionnelles de la direction. Ce décalage abusant du facteur horaire qui se compte en journées de retrait de salaires dénombre un temps de grève qui prédispose à la mauvaise image et à la méfiance des ouvriers enclins à se soumettre au patronat récoltant ainsi fièrement la victoire de son organisation du travail inscrite dans l’assommante abnégation au pouvoir qui caractérise le capitalisme dans la planification de ses prises de bénéfices.

L’Europe que nous propose la Constitution désireuse ardemment entrer en vigueur comme prévu perdrait par l’essence même de ses visées toute possibilité d’ouverture au débat politique, écrasée par l’outrecuidante supériorité d’intérêt voué au tout économique.

Le fond du projet constitutionnel lu entre les lignes et considéré après de nécessaires explications de texte n’est pas l’établissement d’un cadre des convergences sur l’idée européenne mais le boulet traîné par des politiques des habitudes supplantées par une bonne dose de conservatisme primaire qui prétendrait conduire l’individu vers la liberté. Honneurs ne seront rendus qu’aux personnages rentables hors desquels point de société ne serait possible.

Dire « oui » reviendrait à accorder une irréversible victoire au bloc des droites sur l’ensemble du territoire européen et se voiler la face sur ce que ces droites cachent derrière leur multiplicité unifiée par son extrême ? Du pouvoir, que du pouvoir que même les socialistes à faible teneur leur envieraient parfois, abandonnant son frère prolétaire à de fausses nécessités historiques. Du pognon aussi parfois quand la conjoncture économique est favorable grâce aux éclosions de guerres de territoires dissimulées par le nouvel ordre mondial dont l’Europe fait partie et la différence n’est pas énorme au regard de ses prétendues différenciations…
Lors de la guerre en Irak, celle-ci était quoi qu’en dise le particularisme français, partie prenante et intégrale au conflit armé puisque Polonais, Italiens, Géorgiens me semble-t-il aussi appuyèrent de leurs effectifs le corps expéditionnaire américain. Ces alliés européens des Etats-Unis ressemblent à des envoyés spéciaux dépêchés là en éclaireurs prêts à s’allouer une part d’intérêts financiers que leur apporterait pareille démarche incluse dans une Europe désireuse de reluire dans ce nouvel ordre mondial qui concerne l’économie dominante mais pas l’ensemble de l’humanité si ce n’est plus d’une moitié au moins soumise à ses volontés. Dans ce contexte on ne voit vraiment pas à quoi sert l’Europe mis à part qu’elle contribue de tout son poids à en préserver certaines spécificités propres à rompre les équilibres pour forcer de son règne adroit toute méfiance à son sujet qui la concernerait. Le « non » supprime cette possibilité de collaboration puisque son principe fondamental est de préserver la paix et non de créer des guerres pour la faire. L’Europe s’est déjà faite avoir deux fois et ce traité constituerait la troisième de ses erreurs, confrontée qu’elle a toujours été avec la légère majorité droitière qu’elle poursuit. Se tirera-t-on vers le haut ou plongera-t-on vers le bas une fois institutionnalisé Schengen et tous les accords inégalitaires qui en découlent.

Un peu d’histoire…

Léon Blum en octobre 1936 au Congrès de Toulouse rappelle les questions soulevées par l’internationalisme socialiste aux quatre coins de l’Europe. Lorsqu’il évoque le socialisme international qui pratique l’indifférence à l’égard de la grande classe patronale il est extrêmement contemporain, plus encore lorsqu’il parle d’une « démocratie intégrale - sociale » comme une demande de débat et aurait certainement frémi à la possibilité, à la chance qu’auront les Français à dire « non ».

Caracolant d’abord en tête des sondages - ces sortes d’audit de l’opinion publique parfois transformé en organe de manipulation -, le « non » s’est vu rejoindre au coude à coude pour se voir dépasser d’un cheveu avant de repasser finalement largement à la faveur des électeurs avec un remarquable 54% d’avis favorables. Les interventions télévisées pour le « oui » des personnalités que sont Lionel Jospin et Jacques Chirac n’auront eu qu’un temps passé l’effet d’une rêverie temporaire que la réalité de la vie aura bien vite fait oublier. Présentée comme un « europassik park » d’une nouvelle classe politique émergeante,il faut se rappeler de cette Europe à l’histoire toujours en construction un discours de Mitterrand fortement imprégné de la notion de rupture avec le capitalisme lors des décisions pour Mastricht dans lequel il n’hésitait pas à formuler une conception européenne « pas à l’image du Premier ministre italien, pas à l’image… » ainsi qu’une intervention de Georges Marchais ne faisant rien d’autre que d’imposer le référendum pour ne « pas accepter des abandons de souveraineté nationale », flairant avant tout le monde l’instrument digne du pire des pillages capitalistiques, pour ne pas sombrer dans une notion de bon sens trop rapidement établie qui finalement tue le politique. A l’époque des débats sur Mastricht Jacques Chirac était partagé entre « la disparition, la négation même de notre constitution », exigeant que l’ampleur de cette réforme soit soumise à référendum et conduira à des changements politiques.

Il est quand même du domaine de la stupéfaction de se rendre compte à quel point les hommes politiques auront fait les girouettes dès lors qu’ils durent se prononcer, voyant certains d’abord « opposés » puis « pour l’Europe », tantôt figés dans l’immobilisme tantôt décidés à changer les choses, d’autres étant plus réservés, se fiant à l’inéluctabilité du développement des marchés ou cherchant désespérément un compromis entre sociaux démocrates et ultra libéraux encore en discrédits sur les finalités fédéralistes ou unionistes. S’attaquant à toutes les formations politiques le débat européen fait des dégâts une fois qu’après la période de 1981 à 1983 les réformes étaient conduites par la France malgré les positions divergentes par rapport à d’autres partis socialistes européens. A cause de problèmes inflationnistes, finalement le ralliement au SME se fera (Fabius rejoignant Mitterrand dépassant ses réticences premières) et la gauche se rend compte qu’elle ne peut plus penser l’Europe de son unique point de vue, elle doit dorénavant tenir compte des autres socialistes européens mais le sont-ils réellement ou ne dissimulent-ils qu’un socialisme à faible teneur, du socialisme réduit en quelque sorte à rester au service de la droite ?

Dès l’instant où le « non » repasse en tête des sondages au moment où démarre la campagne officielle du tour d’antenne des leaders politiques se soulève la déferlante de menaces qui laisse entendre qu’il n’y aurait pas de plan « B » ou « D » en cas de victoire du « non », que « ce serait une catastrophe si le oui ne gagnait pas » (raison de plus politiquement pour voter « non ») sans parler de la plus significative de toutes lâchée par un François Bayrou en pleine divagation saisit face à un auditoire d’étudiants de Sciences po à Lille d’un « c’est plus de quarante jours qu’il pleuvra si le traité n’est pas ratifié… » et les trop lourdes « il serait préférable de voter oui » ; on constate avec quelle rigueur et quelle satisfaction invétérée les législateurs de cette Constitution voudraient appeler du bons sens la clôture de leurs travaux que scellerait l’adoption du projet de ratification du traité constitutionnel de l’union européenne. Seulement si c’est pour poursuivre une œuvre entamée en la faisant dériver de plus en plus à droite et fournir aux citoyens européens un catalogue de banalités, un cadre législatif nécessaire tant le foutoir doit être effarant, pour que se creusent les sociétés inégalitaires dans une Europe ridée par le nationalisme rampant qui la tanne ; il vaut mieux remettre à plus tard et congédier des travaux aux faibles espérances, une fois que seront mises par écrit un flux de revendications qui marquerait de son seau des populations réellement unies et non plus seulement des Etats qui poursuivront les mêmes exploitations si ce n’est en pire. On dépasse le politique prétendraient-ils pour défendre le projet de Constitution, on ne parle plus en terme de classes sociales et encore moins en considération du prolétariat alors qu’il ne cesse de signaler sa présence à chacune des catastrophes qui l’affectent et on en perd ses politiques de gauche pour se retrouver dans la situation d’une véritable crise du politique dans laquelle l’Europe tente de brouiller les repères. Alors faisons de la politique par un « non » de masse qui remettra les politiques face à leur responsabilité et permettra de se poser la question du décalage dont ils font preuve par rapport aux électeurs qu’ils représentent. Pour qu’il y ait plus d’efficacité en politique, la démocratie ou ce qu’il peut encore en être sauvé ordonne de voter « non »…

Une Europe qui avance à l’abandon de son frère prolétaire soumis aux mêmes arnaques de la récupération des droites militaires nous a déjà montré deux fois de quelle manière elle était capable de sombrer. L’uniformisation rapide ou progressive vers le capitalisme avec la somme des politiques que cela développe - jusqu’à refaire passer la Russie démocratique d’un Gorbatchev à un dirigeant issue de la classe militaire sans penser aux projets nationalistes populistes visés par la Bulgarie impatiente de faire son entrée au 1er janvier 2007 - ne préfigure pas de la meilleure des stabilités, n’encourage pas d’accorder plus loin notre confiance à une politique européenne dont les finalités iront à sens unique ni d’adhérer de près ou de loin à une Constitution qui mettrait en péril l’existence de la gauche dans des pays voisins. Dans ce cadre le « non » rappelle, invite et encourage à voter pour une autre Europe, une Europe qui serait différente de celle ambitionnée par les affairistes, une Europe qui irait encore plus loin dans sa conception humanisante puisque tel est l’un de ses buts revendiqués. Durant la campagne électorale - ils voulaient de la politique dans le débat, ils en auront eu -, le « non » a montré qu’il n’y avait pas qu’une Europe économique des marchés, cette Europe du libéralisme encouragée puis remise en question pour finalement être complètement décriée. Au fil de la vigueur qu’il aura pris, ce « non » aura fait comprendre qu’il demande que ce projet s’inscrive sur une autre échelle de valeurs que celle trop habituellement mise en avant sous l’argumentaire capitaliste car inutile de se leurrer mais une Europe qui avancerait sans que ne soit maintenue et préserver une solidarité prolétarienne est une Europe vouée à l’échec, une Europe qui court à sa perte, une Europe dans laquelle la société ne verra plus que le nœud coulant du capitalisme la pendre. Cette Europe de l’étranglement avec suffocation des plus pauvres à la clé n’est jamais évoquée que par des « nous nous en occupons, cela suivra, l’économique et le social avanceront ensemble » alors que si jusque là, rien de palpable de leurs efforts n’est remarquable ou si peu, pourquoi l’Europe constitutionnalisée permettrait d’améliorer cette situation au terme actuel où est considérée la main d’œuvre volante, flottante mais néanmoins bon marchée que convoite l’ensemble du marché européen prêt à licencier massivement dès que ses bénéfices seront compromis.

L.CH

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